Fabuleuse histoire de Saint Vincent Ferrier, conseiller du Roi d'Aragon et du Pape Benoit XIII, frère dominicain, qui a parcouru l'Europe lors du Grand Schisme d’Occident dans le plus simple dénuement afin de convertir les coeurs et les pousser à la paix.

 
Saint Vincent Ferrier : Une intelligence reconnue

La famille Ferrier est d’extraction écossaise. En effet, cette famille était venue en Espagne participer à la Reconquista. Bien que n’étant pas noble, la famille Ferrier détenait des charges publiques héréditaires et très rémunératrices. Ainsi, le père de Vincent était un notaire royal pouvant exercer dans tout le royaume de Valence. La famille Ferrier était donc connue, respectée et honorée de ses contemporains.

Vincent Ferrier naquit à Valence, en Espagne, le 23 janvier 1350. Très rapidement, il se fait remarquer pour sa vive intelligence. Toutefois, malgré l’excellence de ses études, son caractère resta humble.
A la grande affliction de ses parents qui espérait le voir prendre des charges très rémunératrices et pleines d’honneurs, Vincent demanda, à l’âge de 17 ans, au prieur du couvent des Dominicains de Valence de l’accepter comme postulant. Ainsi Vincent Ferrier fut admis à la profession religieuse en 1368.
A 18 ans, il devint professeur de philosophie, puis professeur de sciences et professeur de théologie. En 1378, il est ordonné prêtre à Valence.
Les mortifications qu’il s’imposait ne l’empêcha, aucunement, d’être appelé, très souvent, par les chapitres, les curés de paroisse et les évêques, pour trancher des procès difficiles ou à être arbitre de litiges. il devint le confesseur de la reine Yolande d’Aragon, puis conseiller du roi d’Aragon. Sa renommé grandi encore, le Pape d’Avignon, Benoît XIII lui demandé d’être son directeur de conscience. Pour se l’attacher définitivement, il lui proposa, sans succès, plusieurs sièges épiscopaux puis d’être cardinal.

Saint Vincent Ferrier : un prêcheur hors pair sur la Fin du Monde

En effet, Frère Vincent n’avait qu’un objectif : il souhaitait prêcher et faire pénitence pour les pêchés de ses contemporains. Et ceux-ci appréciait énormément ses prêches, sans détour. Les vérités les plus difficiles était acceptées grâce à son éloquence et son application à vivre sa vie en conformité avec ses paroles.. Vers les années 1397, le Frère Vincent tomba gravement malade. Tout le monde dans le palais papal pensait qu’il ne survivrait pas à sa maladie. Le 3 octobre 1398, il fut subitement guéri.

Cette guérison, le Frère Vincent l’explique en 1412 dans une lettre destinée au Pape Benoit XIII : « Il y a environ quinze ans, un religieux, dangereusement malade, priait Dieu affectueusement de lui rendre la santé, afin qu'il pût continuer à prêcher la parole sainte ; voilà que pendant sa prière, et dans un demi-sommeil, saint Dominique et saint François lui apparurent à genoux, adressant, eux aussi, au Christ de ferventes supplications. A leur prière, le Christ descendit avec eux vers ce religieux malade, et, de sa sainte main, lui touchant familièrement la joue, il lui confia mentalement, mais d'une façon très distincte, la mission d'aller prêcher par le monde à l'exemple des deux saints qui l'accompagnaient, lui faisant entendre qu'il attendrait les résultats de cette prédication avant la venue de l'Antéchrist. Au contact de la main divine, le religieux s'éveilla complètement guéri. La Providence a bien voulu confirmer cette mission divinement conférée à ce religieux et remplie par lui du meilleur de son coeur ».

Le 22 novembre 1399, le Frère Vincent quittait, enfin, Avignon, pour inaugurer ses voyages apostoliques, avec l’autorisation, à contre coeur, du Pape Benoît XIII. En faisant référence aux missions diplomatiques auxquelles il avait pris part en tant que légat de Saint-Siège, il prit le titre de legatus a latere Christi – légat du Christ. En effet, comme il l’a écrit plus tard au Pape Benoît XIII, le Christ « attendrait le résultat de cette prédication avant la venue de l'Antéchrist ». Ainsi, le sujet, habituel des sermons du Frère Vincent était « La Fin du Monde ».

Et cette atmosphère de fin du monde était justifiée. En effet, de 1378 à 1415, l'Eglise d'Occident était divisée entre trois papes rivaux qui s’excommuniaient mutuellement : l'un à Rome, l'autre à Avignon, un troisième à Pise. Les pires désordres s'étaient glissés dans toutes les paroisses. Les difficultés intérieures, nées du schisme, ne permettaient plus à l'autorité religieuse la répression des abus et la réforme des mœurs. Les peuples avaient oublié les vérités les plus élémentaires de la doctrine chrétienne.
De plus, les Rois de France et d’Angleterre se menaient une guerre sans pitié et sans fin : la Guerre de Cent-Ans (1337 – 1453). Celle-ci générait une terrible misère matérielle et morale.
Les Turcs s’établissaient définitivement à Constantinople ce qui sonna le fin de l’Empire Romain d’Orient.
A tout cela s’ajoutait une terrible épidémie de peste, la Peste Noire, qui ravageait les populations germaniques, d’Espagne, de France et d’Italie : La santé, la vie matérielle, morale, culturelle et spirituelle des hommes de cette époque étaient en train de s’effondrer totalement.

Saint Vincent Ferrier : un voyageur européen

Frère Vincent voyage tantôt à pied, tantôt à dos de mulet. Il va d'Avignon à Valence, fait ses adieux à sa patrie, parcourt toutes les provinces d'Espagne, franchit les Pyrénées à Saint-Sébastien, visite tout le Midi, passe en Italie, puis évangélise la Suisse, le centre de la France, remonte vers la Belgique, revient vers la Franche-Comté, incline vers Bordeaux et finalement se dirige vers la Bretagne ou après l'avoir évangelisée, meurt à Vannes dans une très extrême fatigue. Tous les pays d'Europe qui sont restés fidèles au Pape d'Avignon ont entendu sa parole. Cette parole est d'ailleurs toujours la même : « Convertissez-vous ! Dieu m'envoie vous dire qu'il va frapper le monde ! Je suis l'ange annoncé par l'Apocalypse, celui qui doit précéder l'Antéchrist ».

Ainsi, Frère Vincent parcourt les routes de l’Europe pour appeler à la réconciliation, à la paix, exhorter les chrétiens à être fidèles à leur baptême, inviter chacun à se purifier la conscience. De plus, conscient du danger de ce schisme désastreux pour l'Eglise, et constatant très tôt des conséquences de celui-ci sur le vie spirituelle de ces contemporains, Frère Vincent travaille sans relâche à y mettre fin.